Par Judith Trudeau
Première vp du Conseil central des Laurentides


N’ayez crainte, je ne lis plus tout ce qui s’écrit aux CLG à la une. Je vous suis pourtant dans vos résumés de CÉ et de CRT. J’ai particulièrement apprécié le texte de Joan sur la rétro. Dans les résumés d’AG, je suis même capable d’attribuer certaines paroles à certains personnages du village de Lionel. De loin, je constate que vous n’avez toujours pas de PIEA. Coup donc, à une époque, c’était une priorité. Mais savez quoi? Là où j’ai été particulièrement étonnée, c’est le texte qui accompagne le changement de structures à Lionel. 

Comment vous le dire gentiment…Mais c’est du grand n’importe quoi? Sérieusement?? Une direction aux couleurs des Barbapapas. On a décidé de mettre tous les mots creux possibles et inimaginables, peser sur le bouton du blender et proposer une bouette arc-en-ciel.

J’ai mal aux mots (supposés porteurs de sens)[1]

6 fois le mots transversalité dans cette présentation. Agilité, adaptation, expérience utilisateur, optimisation de performance, rayonnement, partenaires, transformation, bienêtre sans trait d’union (pomme rentrée!), sais pas pour vous, mais je ne sais pas à qui s’adresse ce document. S’il est la lubie d’un gestionnaire, qu’il reste dans ce nuage. Faut-il rappeler à notre direction que nous sommes dans un milieu d’enseignement postsecondaire? Qu’il y a de la détresse post-pandémie? Que les profs tentent par tous les moyens de transmettre des savoirs nécessaires? Qu’il y a un certain désengagement? (c’est de ça dont ce document nous parle quand il fait référence à des changements de paradigmes[2], sic.)

Ce n’est pas de changement de structure dont nous avons besoin (on se croirait dans une réforme en santé alors que les urgences débordent), c’est de reconnaissance de ce qui se fait de bien chez nous.

Donnons une fleur à un cadre qui est venu soutenir profs et étudiants en musique (jeudi jazz). On n’a pas besoin de parler de performance, de réussite, de rayonnement et de transversalité. On parle de quelqu’un qui fait bien sa job, qu’il l’aime et que son geste est porteur de sens. C’est de ça dont il faut parler.

Je ne souhaite pas d’un DG comptable : « Sous une apparence objective, opératoire et pragmatique, la gestion managériale est une idéologie qui traduit les activités humaines en indicateurs de performance, et ces performances en coûts et bénéfices. » (Gaulejac, 2009 : 38) Je souhaite un DG qui fasse confiance à son monde. Cela, n’a pas de prix.

Je vous laisse sur une image. Vous vous souvenez de la pieuvre de l’économie du savoir[3]? Un travail d’analyse sur les maux de la marchandisation de l’éducation. On ne peut pas ne pas voir le parallèle du document présenté par la direction et cette idéologie. Faites l’exercice. Regardez, la consolidation de la structure administrative, on dirait vraiment que la pieuvre a pris de l’acide.

Bonne fin de session.


[1] Consolidation de la structure administrative du Collège Lionel-Groulx, document de présentation.

[2] Le terme paradigme nous vient de Thomas Khun dans La structure des révolutions scientifiques (1962). Il fait appel à des changements majeurs (paradigme de la terre plate, paradigme de la terre ronde). Il s’utilise pour marquer les changements de fond et s’utilise rarement voir jamais au pluriel.

[3] https://fneeq.qc.ca/fr/publications/chronique-81-au-menu-des-eges-la-pieuvre-de-leconomie-du-savoir/